Voilà encore un projet fou qui se réalise. Comme quoi les rêves sont bien le moteur de la réalité.
Nous avions déjà fait le décollage du Dôme des Écrins en 2011 pour première expérience de vol rando, mais là on savait que c’était une dimension supplémentaire. Autant nous n’étions pas bien préparés pour le Dôme autant là, nous étions super prêts.
D’abord le matériel. J’avais acheté un petit biplace d’occasion pas cher Huapi 34 à 5,8 kg, car il était hors de question de monter avec le Béta3, 42 et ses 9.5kg !!!! A coté de ça nous avions une sellette-sac de chez Rip’air à 400gr et une sellette néo à 290 gr. Soit un équipement total parapente entre 6,5 et 7 kg max contre 13,5 kg au Dôme des Écrins !!!
Coté physique, depuis mi-avril un peu de vélo, quelques montées à pied avec parapente sur le dos, un fond de piscine, un vol rando au pic de Bure avec Bernard et une traversée des falaises de Cassis en grosses chaussures, plus le matériel pour tester les ampoules…
Le problème du Mont-Blanc c’est que c’est haut. Entre ceux qui disent 4807 et ceux qui affirment 4810, la moyenne est à 4808,5 !! Quand on habite au bord de mer à l’altitude de zéro ou presque c’est un vrai souci de faire des efforts à cette altitude. Heureusement la médecine a trouvé quelque effets secondaires intéressants sur un médicament initialement prescrit pour faire baisser la pression dans l’œil et le cerveau… Le Diamox !!!
Sur les conseils de Bernard Van Minh et de Frigo on s’est traité au Diamox le jour du départ et ensuite régulièrement tout au long de l’ascension (2 cachets/jour). En plus évidemment d’aspirine 1,0g pour fluidifier le sang devenu épais par la production de globules rouges… Résultat pas un mal de tête, rien ! Pas l’ombre d’une céphalée ! On est monté et avons profité du sommet un maximum. Même pas la moindre ampoule, à peine une petite courbature sur les cuisses.
Nous avions projeté l’ascension en 3 jours par le Goûter, histoire de bien s’acclimater :
Jour1 : départ de Toulon et arrivée aux Houches pour prendre le télécabine, puis le train à crémaillère jusqu’au nid d’aigle. A partir de là attaquer l’ascension pour rejoindre le refuge de Tête Rousse à 3200m.
- Jour2 : Départ de Tête Rousse pour l’ascension du couloir de Goûter si bien nommé « le couloir de la mort » ! (Hélas nous serons les témoins d’un terrible accident faisant 2 morts) pour rejoindre le refuge du même nom à 3800m. Histoire de bien se reposer et passer une nouvelle nuit en altitude pour bien s’acclimater.
- Jour3 : ascension finale jusqu’au sommet et peut-être un décollage si les conditions sont bonnes, afin de redescendre sans se fatiguer.
Nous avons suivi le plan établi le premier jour mais dès le lendemain la météo et notre bonne forme physique ont modifié quelque peu nos plans…
Jour1 Départ de Toulon et c’est parti pour 6h de route…
Puis le téléphérique des Houches
Pour aller chercher le petit train à crémaillère qu’on a failli rater…
Mais les contrôleuses ne sont pas celle de la SNCF…
Dans le train, beaucoup d’alpinistes et quelques promeneurs
ça monte bien et on sort de la forêt
Arrivée terminus du train, tout le monde descend, ambiance montagne…
Départ pour le refuge de tête rousse à 3200 avec les bouquetins de l’office du tourisme…
Le refuge est là haut, il faut environ 2h30-3h depuis le train.
On marche entre nuages et soleil, j’ai un peu mal à la tête… vite aspirine !
Arrivée au refuge, changement de décor !
Jour2 donc départ 7h40 pour le refuge du Goûter pour l’ascension du couloir du même nom , au bout de mon doigt.
On monte vers le passage de la traversée du couloir…
.
On vient juste de traverser le couloir et on va entamer la montée sur l’arrête, entre rochers, neige et glace..
Hélas nous allons entendre les cris de 2 alpinistes en train de dévisser dans le couloir et retrouver juste après leur gourde et leurs bâtons de marche… L’horreur. Nous resterons bloqués dans l’arête pendant presque 1h le temps aux secours d’évacuer les corps. Les gars sont tombés depuis l’arête rouge à droite du couloir et ont dévalé le couloir jusqu’en bas…
On reprend l’ascension de l’arête mais je suis particulièrement atteint par les morts qu’on vient de voir…
Mais on poursuit…
Sortie vers midi de l’arête du Goûter au soleil !
L’ambiance change du tout au tout, on quitte l’arête et le couloir maudits pour se retrouver sur un dôme de neige immaculé au soleil !!! Le refuge est juste derrière nous à droite.
Tout au long de l’ascension de l’arête on a demandé aux cordées qui descendaient comment étaient les conditions au sommet. Les premières cordées ont dû renoncer au sommet après le refuge Vallot à 4200m à cause du vent glacial. Les dernières cordées ont fait le sommet et les guides nous confirment que le vent est prévu faiblissant dans la journée et se renforçant dès le lendemain… Du coup on commence à se dire que si on veut faire le sommet et avoir une chance de redescendre en volant il faudrait le faire dans la journée… Après une bonne pause au refuge pendant 1h, un bon repas et nos Diamox et aspirine avalés, on décide de monter voir de plus près… Il est 13h quand on quitte le refuge.
La haut la grosse bosse c’est pas encore le Mont-Blanc qui est derrière mais le dôme du Goûter (4300)
Au cours de notre ascension on va croiser toutes les cordées qui redescendent. Finalement sans le faire exprès notre timing improvisé va nous permettre de faire un Mont-Blanc exceptionnel, seuls au sommet avec une météo parfaite !
Ouf il est là ! La pointe au dessus du dôme c’est le Mont-Blanc (4810) !!!!
Après le refuge Vallot le vent est nettement plus fort et il fait aussi beaucoup plus froid. Heureusement ma panoplie de braqueur fait parfaitement l’affaire…
Là on est toujours en forme, aucun mal de tête. On se dit que ça sent bon le sommet…
Il y a quand même des passages bien aériens… Tout en bas c’est la vallée de Chamonix. Et le truc que je porte sur le dos c’est le sac du parapente biplace….
Allez on y est bientôt, on est essoufflés mais on savoure les dernières portions avant le sommet
Et voilà il est 17h30 et on est seuls au sommet avec un temps parfait !! C’est incroyable.
Je suis quand même en stress pour le décollage en parapente. Le vent est assez travers au sommet et assez fort. Sur l’arête juste en dessous les rafales étaient assez violentes…
C’est vraiment extra d’avoir le Mont-Blanc rien que pour nous ! Chamonix tout en bas…
On aperçoit l’aiguille du midi et Eric continue sa liste de remerciements… A ma mère, mon père, ma sœur, ma femme, mes enfants, Caro, le pape piXII, mes cousins, mes arrières trucs, et lui qui m’a prêté les piolets et lui les crampons, et….. Ça a duré 25 min… je ne vais pas vous le mettre en vidéo c’est juré !
Finalement la décision est prise de redescendre sur le dôme du Goûter 500m en dessous pour décoller. Les conditions sont vraiment pas au top pour décoller un biplace à 4810m…
Du coup une petite heure plus tard on se prépare et on s’envole ! …
Le refuge du Goûter en dessous sur l’arête où on aurait dû dormir…
On est supers contents d’éviter la redescente par le couloir du Goûter… Vive le parapente !
C’est long un plomb de presque 4000 m même avec notre petit biplace qui plane moyen …
On choisit de poser à Passy car Chamonix est à l’ombre, et les Houches c’est bien encaissé.
Attéro nickel et deux parapentistes du coin nous ramène direct à notre camion aux Houches où on se paye un super resto !
Dodo dans le camion et retour le lendemain tranquillement.
Voilà merci la vie encore une fois. Et merci Eric d’avoir assuré et insisté pour faire ce mont-blanc. Et une pensée à ceux qui sont morts ce jour. J’ai pris conscience ce jour que la montagne c’est toujours risqué.
Mais j’ai un secret, j’avais avec moi l’ours polaire que Colin m’avait donné pour les Écrins et qui m’avait porté chance… 🙂
Les rêves sont le moteur de la réalité. Je l’ai déjà dit. Je voudrais remercier tous ceux et celles avec qui j’ai rêvé de toutes ces aventures. J’ai découvert le massif du mont-blanc en 2008 avec Steph et Raph, Eric et Sylvie et Marianne. Nous étions montés à l’Aiguille et c’est là je crois que la petite graine s’est plantée dans mon cœur et a continué à pousser toutes ces années…
A+ Guillaume
Bruno, quand t’es engagé dans la montagne, tu ne peux pas « arrêter » instantanément. C’est comme en parapente et que ça tape, tu ne ne peux pas sortir le pouce et dire « j’arrête, je ne joue plus ». Tu n’as pas d’autre choix que de poursuivre au minimum le temps de sortir de cette phase difficile. Là c’était la même chose. Si on faisait demi-tour il fallait repasser par ce couloir du Goûter dangereux et encore se taper plusieurs heures de marche pour redescendre… En avançant on sortait de cette arête et la suite est plus agréable si t’as pas mal à la tête… et en redescendant en volant on évite tous les dangers de la descente !